La baisse des prix des céréales s’accentue
Face à une demande en berne et à une rechute des prix en mer Noire, les cours des céréales européennes s’enfoncent sur de nouveaux plus bas niveaux depuis le début de la campagne.
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Face à une demande européenne et internationale en berne et à une rechute des prix en mer Noire, les cours des céréales européennes s’enfoncent sur de nouveaux plus bas niveaux de campagne. Le colza suit le mouvement par sympathie bien que les prix des tourteaux de soja se redressent sur fond de weather market sud-américain.
La rechute des prix mer Noire entraîne le blé français à la baisse
Après un net ralentissement des chargements à l’exportation depuis la fin de novembre pour cause de difficultés logistiques et de rigueur de l’hiver, les disponibilités de blé russe encore à vendre sont records. Les opérateurs et producteurs locaux s’en inquiètent et reviennent à la vente. Les prix russes chutent de manière significative pour retrouver davantage de demande sur les mois à venir. En perdant 7,50 $/t, à 229 $/t Fob Novorossik sur la semaine, ils reviennent au plus bas depuis le 2 novembre dernier.
À cette ambiance baissière s’ajoute la montée en puissance des ventes ukrainiennes de blé. Le nouveau « corridor militaire » organisé par Kiev aide l’activité à l'exportation à tourner à plein régime. L’attaché local de l’USDA (ministère américain de l’Agriculture) en Ukraine vient ainsi de réviser les prévisions d’exportation de blé du pays sur la campagne de 2023-2024 à 17,7 millions de tonnes.
Dans un tel contexte, la situation européenne s’alourdit. Les importations de blé tendre dans l’Union européenne atteignent désormais 5,6 millions de tonnes contre 5,2 millions de tonnes l’an passé à la même période. La demande domestique européenne est en berne, que ce soit pour l’alimentation du bétail ou pour l’alimentation humaine. Les exportations n’accélèrent pas assez.
Ainsi après un excellent mois de janvier en matière de chargements de blé en France avec 1,55 million de tonnes vers les pays tiers, le mois de février s’annonce moins bon. Les importateurs marocains sont notamment en retrait en raison d’une diminution de leur restitution mensuelle pour importer sur février.
Dans un tel contexte, et face au besoin de trouver davantage de demandes, les cours français n’ont d’autre choix que de suivre le prix du blé russe dans sa baisse. Le blé Fob Rouen a ainsi perdu 7 $/t sur la semaine passée, à 234 $/t. Le blé rendu Rouen perd 6 €/t sur la semaine à 208 €/t base juillet. Les prix reviennent ainsi sur leur plus bas niveau depuis juillet 2021.
Un manque de débouchés pour les orges françaises
Le cours des orges fourragères accuse une nouvelle baisse cette semaine, perdant 5 €/t en rendu Rouen pour atteindre les 186 €/t en base juillet. C’est la poursuite du mouvement entamé voilà plusieurs semaines, avec une perte de plus de 20 €/t depuis la mi-décembre. Il faut dire que le contexte est peu porteur pour les exportations françaises, dont les estimations s’affichent au plus bas depuis 2016 à seulement 6 millions de tonnes.
La reprise des flux entre l’Australie et la Chine depuis l’été 2023 concurrence les origines françaises, sachant que depuis deux ans l’empire du Milieu représentait plus de 70 % des parts de marché de nos exportations vers les pays tiers. De plus, les festivités de la nouvelle année en Chine approchent et n’augurent aucun rebond de la demande à court terme. La forte compétitivité des origines australiennes reste d’actualité en cette seconde partie de campagne.
En France, la demande locale ne parviendra pas à compenser ce manque de flux internationaux. Ce qui laisse une perspective de stocks de fin de campagne à plus de 2 millions de tonnes, au plus haut depuis 2010. En effet, les volumes de blé fourrager et de maïs ukrainiens continuent d’approvisionner l’Union européenne. L’abondance de céréales fourragères pèse sur le prix et les orges touchent un plus bas depuis avril 2020.
Du côté de l’orge brassicole, une hausse des surfaces des semis est attendue aussi bien à l’échelle européenne que française. Les cours des orges de printemps sur la récolte de 2023 ont drastiquement chuté à 290 €/t base juillet Fob Moselle. Ce mouvement entraîne dans son sillage les origines scandinaves, dans un contexte d’échanges limités.
Repli des cours du colza
Au cours de la semaine écoulée, les cours du colza Fob Moselle ont reculé de 13 €/t. La graine française est pénalisée par la lourdeur du marché des huiles. En particulier, l’huile de colza à Rotterdam, référence européenne, maintient son mouvement de repli. Elle s’affiche désormais sous le seuil de 830 €/t pour des livraisons rapprochées. La dynamique baissière en place depuis le mois d’octobre se poursuit.
Dans ce contexte, l’huile de colza reste très compétitive par rapport aux autres huiles végétales, notamment l’huile de palme et celle de soja. Cela favorise la relance de la demande et le maintien de la dynamique de trituration européenne. La Fediol (association des triturateurs européens) a annoncé un record de trituration de colza en décembre dernier avec près de 1,8 million de tonnes transformées. Pour autant, afin de maintenir une telle cadence de trituration en Europe, il sera nécessaire de trouver des volumes disponibles de graines de colza.
En cette seconde partie de campagne, les importations européennes devraient ainsi s’orienter vers les flux en provenance de l’Australie afin de prendre le relais sur les importations ukrainiennes. À ce jour, les volumes de la récolte de 2023 encore à commercialiser de la part des agriculteurs sont toujours importants. FranceAgriMer estime les stocks de colza en dépôt chez les collecteurs français à près de 750 000 tonnes à la fin de décembre, un nouveau record de plus de 20 ans, et ce sans compter les stocks en ferme.
Les prix des tourteaux de soja retrouvent de la stabilité
Tous les regards des opérateurs sont tournés vers les perspectives de production en Amérique du Sud. Les récoltes progressent au Brésil et les retours des producteurs permettent d’ajuster les estimations. Les analystes locaux revoient leurs chiffres les uns après les autres, et les volumes de soja brésilien pourraient être inférieurs à 150 millions de tonnes, contre 160 millions de tonnes l’an passé.
Pour autant, l’arrivée de ces volumes sur le marché mondial rassure tandis que les regards se tournent vers l’Argentine. Si les conditions climatiques ont été optimales depuis les semis, l’épisode actuel de sécheresse et de chaleur dégrade les conditions de culture, avec désormais 36 % des surfaces de soja en bonnes ou excellentes conditions, contre 55 % il y a deux semaines. Si l’optimisme se maintient en Argentine, la poursuite de cet épisode climatique pourrait entraîner des pertes de rendement.
En France, les prix des tourteaux de soja marquent une légère hausse de 1 €/t sur la semaine à 485 €/t en délivré Montoir pour des livraisons rapprochées, après avoir touché un point bas à 466 €/t en cours de semaine.
(1) Argus Media est une société spécialisée dans le suivi des marchés des matières premières.
À surveiller : Conditions météorologiques en Amérique latine (soja, maïs), en Europe (céréales d’hiver, colza), situation géopolitique en mer Noire, trafic maritime en mer Rouge, conjoncture économique mondiale, parité euro/dollar.
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